Montlhéry, cité millénaire.
Aujourd'hui :
|
|
La bataille de MONTLHÉRY
Cette page est directement extraite de la notice réalisée
par M. PAYEN à l'occasion du millénaire des Capétiens.
Consultez également le récit
détaillé et passionnant extrait de "Louis XI" (45K)
Mémoires
de Philippe de Commynes (en anglais)
1465 Cet été là, à MONTLHÉRY
Ce fut en juillet, par une chaude journée d'été que les armées
royales de LOUIS XI et les armées bourguignonnes conduites par CHARLES
comte de Charolais, fils du Duc de Bourgogne, alliés aux Seigneurs
de la "Ligue du Bien Public", s'affrontèrent pour
cette mémorable bataille.
Le décousu et l'imprévu de la bataille de MONTLHÉRY indiquent déjà
cependant une nouvelle manière de combattre. Le Comte de Charolais
voulant joindre l'armée du Roy LOUIS XI avant qu'elle pût rentrer
à Paris, venant d'Orléans, avait pris position à LONGJUMEAU, son
avant garde au bourg de MONTLHÉRY. Le Roy prévenu de la présence
du Comte sur la rive gauche de la Seine avait mandé en hâte à Charles
de MELUN, son lieutenant général dans l'Ile-de-France, de faire
partir de Paris deux cents lances sous le Maréchal RONAULT afin
de prendre les Bourguignons à revers.
Le Comte de Charolais s'était retranché dans Longjumeau avec ses
chariots et le matin du 16 juillet 1465 le Roy occupait le château
de MONTLHÉRY à la tête de l'armée, et voulait en toute hâte gagner
Paris. Ce que voyant le Comte de Saint-Pol commandant l'arrière
garde des Bourguignons fit un mouvement en arrière, laissant entre
lui et l'armée du Roy, un ruisseau et des bois, mais ne voulut pas
aller plus loin. Charles de Bourgogne partit donc de Longjumeau
et se joignit à l'avant garde. On connaît l'assiette du champ de
bataille (voir le plan annexé). Le
village de Longjumeau est à cheval sur la petite rivière de l'Yvette,
dans un vallon peu prononcé. Du côté du midi s'étend jusqu'au bourg
de MONTLHÉRY, un plateau coupé par deux petits ruisseaux coulant
dans des fonds marécageux, et l'un se jetant dans l'Orge, l'autre
dans l'Yvette. La chaussée d'Orléans passe par Longjumeau et le
bourg de MONTLHÉRY sur le plateau. Au nord de MONTLHÉRY à environ
un kilomètre est une petite éminence.
Charles de Melun ne put réunir les deux cents lances demandées
par le Roy, qui, du haut du donjon du château, ne voyant rien venir
du côté de Paris, eût voulu éviter la bataille. Le Comte de Charolais
se contentant de barrer le chemin de la capitale à son adversaire,
ne paraissait pas soucieux de l'engager. Mais les chefs des deux
avant-gardes en décidèrent autrement, et ne se trouvant séparés
que par un ruisseau (voir en A et B) en vinrent aux mains (voir
en A' et B').
Les Bourguignons étaient déjà massés, tandis que les Français arrivaient
à la file pour soutenir leur premier corps. Pendant que les chefs
bourguignons discutaient s'il fallait mieux combattre à pied ou
à cheval, l'armée royale avait eu le temps de se mettre en bataille,
et l'action s'engagea, non plus comme jadis, sur un front étroit,
mais sur une longue ligne ; si longue, que pendant que l'aile droite
commandée par le Comte de Charolais enfonçait l'aile gauche française,
l'aile droite de l'armée royale battait à fond l'aile gauche des
bourguignons. Les centres étaient restés sur leurs positions respectives.
Le Comte de Charolais, qui commandait l'aile droite victorieuse
des bourguignons poussa si loin, qu'il eut grand peine à rejoindre
les siens et faillit être tué.
" Jamais, dit COMMYNES,
plus grande fuite ne fust des deux côtés ; mais par espécial démourèrent
les deux princes aux champs. Du costé du Roy fust un homme d'Estat
qui s'enfuit jusqu'à Lusignon, sans repoistre ; et du costé du Comte;
un autre homme de bien jusque en Quesnoy-le Comte. Ces deux n'avaient
garde de se mordre l'un l'autre ".'
Pendant ces deux fuites des ailes gauches des deux armées, les
centres se canonnaient. L'artillerie, de part et d'autre avait suivi
la route d'Orléans et pouvait se déployer plus facilement que les
Français, resserrés entre des ravins et des bois, et arrivant à
la file. Aussi son aile droite qu'il commandait en personne, ayant
poussé ses archers devant elle, l'aile gauche des Français (voir
en D) recule jusqu'aux premières maisons du bourg (voir en D').
Là dit COMMYNES, témoin oculaire : "Ceux (les archers à
cheval) de la part du Roy les conduisoit PONCET de la RIVIÈRE, et
estoient tous huissiers d'ordonnance orfovérisés et bien en point.
Ceux du costés des Bourguignons estoient sans ordre et sans commandement,
comme volontaires ".'
Ils étaient venus d'une haleine à travers champ de Longjumeau :
" Si commencèrent les escarmouches... le nombre
des Bourguignons estoient grand. Et gaignèrent une maison, et prindrent
deux ou trois huis, et s'en servirent de parois. Si commencèrent
à entrer en la rue et mirent le feu en une maison (voir en C) le
vent leur servoit, qui poussoit le feu contre ceux du Roy, lesquels
commencèrent à désemparer et à monter à cheval et à fuir; et sur
ce bruit et cry, commença à marcher et à fuir (poursuivre) le Comte
de Charolais laissant, comme j'ay dit, tout ordre paravent divisé... "
" Tous
les archiers du dit Comte marchoient à pied devant lui avec mauvais
ordre ; combien que mon advis est, que la souveraine chose du monde
pour les batailles, sont les archiers, mais qu'ils soient à milliers,
car en petit nombre ne valent rien, et que se soient gens mal montés,
à ce qu'ils n'ayent point de regret de perdre leurs chevaux, ou
du tout n'en ayant point.. ".
Quand l'attaque du Comte eut ainsi refoulé l'aile gauche française
les hommes d'armes du Roy ralliés, se divisèrent en deux troupes
et, débordant la ligne des archers, voulurent attaquer la cavalerie
du Comte. Celui-ci, au lieu de l'attendre, passa tout à travers
ses propres archers et prit ainsi la cavalerie française an flanc
pendant qu'elle opérait son mouvement, la coupa et la mit dans le
plus grand désordre, si bien qu'elle tourna le dos, et fut si vivement
poussée, qu'elle ne put se ralier.
L'aile gauche bourguignonne était plus faible que l'aile droite
des Français qui , de ce côté, arrivaient toujours. Elle fut enfoncée,
séparée du centre et rejetée dans les bois et le long de l'Orge.
Les Français, pour obtenir ce résultat, paraissaient avoir appuyé
leur attaque sur le petit village de Chapelle-Villiers.
Cette étrange bataille, où les deux partis furent vainqueurs ou
vaincus, présente cependant un grand intérêt. Ce ne sont plus des
masses qui se heurtent de front. Le champ de bataille était bon,
bien choisi, et permettait à chacune des armées d'obtenir un résultat
décisif, car chacune des ailes victorieuses eût pu se rabattre sur
le centre. Or l'aile droite des Bourguignons, ayant la première
enfoncé l'aile gauche française, eût pu obtenir un succès éclatant
en laissant ses archers maintenir l'ennemi défait, sur ce point
et en se jetant de flanc sur le centre de l'artillerie. CHARLES
aima mieux poursuive sa victoire partielle pendant que sa gauche
était écrasée.
Mais si le succès de la bataille fut ainsi partagé, ses conséquences
furent à l'avantage de LOUIS XI. Les Bourguignons étaient désormais
hors d'état de lui barrer le chemin de Paris, et ils passèrent une
nuit fort oiseuse dans Longjumeau : croyant être tournés par
la droite française, il n'en était rien cependant, LOUIS XI ne voulait
pas risquer une seconde bataille, et les Bourguignons purent s'en
retourner par où ils étaient venus, tout en s'attribuant une victoire
sans autre résultat que la perte de deux à trois mille hommes.
Il n'en est pas moins évident que la tactique se transformait.
Les ailes des armées devenaient mobiles, et pouvaient agir. pendant
que le centre renforcé par l'artillerie, gardait ses positions.
Mais l'infanterie, qui jusqu'alors n'avait été employée qu'en tirailleurs,
archers, arbalétriers, ou qui n'avait su opposer aux attaques de
la cavalerie, en rase campagne, que des masses compactes, sans initiative,
comme à la bataille de ROSBECQUE, en 1382, était en ligne, commençait
à se former en bataillon aussi bons pour l'attaque que pour la défense.
En fait c'est à MONTLHÉRY que pour la première fois fut utilisée
l'artillerie. Une note des archives du département du Nord rend
compte de l'emploi des armes par le Comte de Charolais à cette bataille.
"Le 16 juillet : 5 caques de poudre pour les serpentines et
les ribaudequins : 1 500 livres de plommets ou petits boulets
de plomb. Les 17 et 18 juillet : un caque de poudre et 100 livres
de plommets. Durant les trois jours : 223 fûts et fers de lances,
154 vouges. 360 piques férrées, 1 800 arcs à la main, 38 400 flèches,
700 douzaines de cordes d'arcs. Sept serpentines de bronze éclatèrent
pendant la bataille."
Le bourg de MONTLHÉRY avait beaucoup souffert de l'affrontement,
une partie des habitations fut brûlée et détruite. Les habitants
se ressentirent longtemps de cette terrible lutte car le Roy LOUIS
XI, ne fit rien pour les dédommager, ni les relever
des pertes qu'ils avaient subies.
Cette plaine dite "du champ de bataille" resta inculte
plusieurs siècles durant. Seul vestige du terrible événement, reste
cette croix, probablement édifiée par le Chevalier
Bayard (Pierre Terrail) en mémoire de son grand-père qui trouva
la mort durant la bataille. On peut lire aujourd'hui sur la plaque
rénovée :
"Bataille de Montlhéry
16 juillet 1465
En hommage au Sénéchal de Brézé
et au Chevalier du Terrail
tués lors de cette bataille"
|