Montlhéry, cité millénaire.
Aujourd'hui :
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LA TOUR DE MONTLHÉRY Par Auguste VILLIERS (I)
Vous trouverez ici un feuilleton savoureux déniché
par J. Peyrafitte. La brève
notice rédigée par ses soins en fin de page vous
en donne quelques clés ... Quatre chapitres sont là
pour vous régaler !
I
Le 1er janvier de l'année 1848, André Pichot, du
village de Linas, montait à Montlhéry, gêné
et guindé dans son habit des dimanches. Il allait comme tous
les ans à pareille époque souhaiter la nouvelle année
à son oncle Jérôme Sainfoin, et à la
petite Rose Sainfoin sa cousine.
André Pichot, le héros de cette histoire, n'a pas été
favorisé par la nature; outre qu'il a l'esprit très
borné, il a un physique très désagréable;
il ajoute à cela un ton prétentieux et un coeur sentimental,
presque chevaleresque; parce qu'il sait lire et écrire, il
se fait beau parleur et dit des sottises avec un aplomb qui ferait
croire à celui qui l'écoute qu'il a voulu faire un compliment.
Or, Pichot est entré chez son oncle, et après les embrassades
et souhaits d'usage, résolu d'aborder un projet sans doute
réfléchi, il se posa carrément, une jambe en
avant, roule un instant son chapeau entre ses mains, et passe sa main
droite dans son gilet et débute ainsi:
- Mon oncle Sainfoin, vous que le ciel a fait avoir une jolie fille,
douze arpents de terre, et pour être le frère de ma mère,
je viens ce matin vous faire une proposition qui vous honorera, et
que par cette raison vous accepterez.
- Quelle est cette proposition, Pichot ? dit le père Sainfoin,
riant en lui même de la pose magistrale de son neveu.
Jérôme Sainfoin est un gros paysan peu éduqué,
mais plein de bon sens et bon diable.
Rose Sainfoin est un peu plus distinguée que la paysanne ordinaire;
elle est jolie, elle s'en doute, et je ne sais si son coeur a déjà
parlé, mais ce qui est facile de voir, c'est que ce n'est pas
en faveur de son cousin Pichot.
Quand ce dernier entra, elle était occupée a passer
dans un fil d'argent les dernières perles d'une jolie bourse
qui avait sa destination pour ce jour-là, car ses doigts
allaient avec activité; aussi quand Pichot l'eut embrassée
elle se remit à son travail sans dire un mot.
André Pichot continua, après une pause :
- Oncle Sainfoin, je vous demande la main de votre fille.
Rose fit un brusque mouvement, mais ne releva pas la tête.
Pichot attendait la réponse de son oncle, comme Achille aurait
attendu, la lance en arrêt, l'infortuné Troyen qui aurait
osé se mesurer à lui.
- Ah ! dit l'oncle, ceci est sérieux, mon neveu; tu as vingt-cinq
ans, tu es libre, maître de ton bien, tu feras je crois un bon
mari.
Pichot s'inclina.
- Si ma fille accepte la proposition, moi j'y consens, et nous verrons
à obtenir des dispenses.
Un mouvement qui se fit en cet instant, dans un angle de la pièce,
fit voir à Pichot que cette scène avait un témoin.
En effet, Charles Girard, un des prétendants de la demoiselle
Rose, était là, écoutant à l'écart.
La proposition d'André Pichot l'avait fait sourire, la réponse
du père Sainfoin le fit bondir. Il aurait parlé si un
regard de Rose ne l'eut cloué net à sa place.
Cependant Rose s'était levée; elle avança vers
Charles, et lui donnant la bourse qu'elle venait d'achever :
- Voici le cadeau promis, dit-elle; puis se tournant vers son cousin
André Pichot, je suis en effet la maîtresse de te choisir
pour mon mari, je te connais, nous avons été élevés
ensemble et je n'ai aucun motif pour te refuser.
Charles bondit de nouveau, la bourse lui échappa des mains;
Pichot se rengorgea.
- Mais écoute, continua-t-elle, en jetant un regard malin vers
le coin où Charles Girard bouillait d'impatience, écoute
: II y avait sur le plateau de la tour de Montlhéry un puits
profond où disparaissent, selon les vielles légendes,
les victimes des seigneurs de ce manoir; et bien! ce puits, comblé
par les ruines, à été perdu par le temps, il
s'agit de le retrouver et de le rétablir; je ne serai jamais
la femme d'un simple paysan, car tu sais, fit elle en minaudant, que
je suis ambitieuse, mais je donnerai ma main à celui qui pour
moi se sera rendu célèbre.
A cette sortie imprévue, Pichot resta interdit : il allait
répliquer, mais son orgueil venant à son aide, et ayant
sans doute repris courage, il serra la main de son oncle, embrassa
sa cousine, et lançant un regard de défi à Charles
Girard qui riait dans son coin, il sortit.
Chapitre II
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