Montlhéry, cité millénaire.
Aujourd'hui :
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LA TOUR DE MONTLHÉRY Par Auguste VILLIERS (II)
Résumé du chapitre I : André Pichot
est venu demander la main de sa cousine Rose à son oncle Sainfoin.
Pour consentir à l'épouser, la belle lui lance le défi
de retrouver le puits de la Tour de Montlhéry ...
II
De cet antique manoir qu'on nommait le château de Montlhéry,
il ne reste plus aujourd'hui que des débris. Le castel était
flanqué de sept tours, dont trois seulement sont restées
debout, malgré les injures du temps et les efforts des hommes,
qui après avoir édifié ne savent rien mieux
que de détruire.
Quand je dis debout je me trompe, car des trois tours, l'une n'a
plus que le tronc, la deuxième qu'un pan de muraille; seule
la grande tour qui domine le plateau est restée presque entière.
Depuis mille ans ces vieux murs sont l'abri des oiseaux de nuit
et le point de mire des générations de la contrée,
qui regardent cette tour comme une veille amie, témoin, impassible
de leur naissance et de leur mort.
Le versant sablé et planté de genêt est le
rendez-vous des amants de Linas et de Montlhéry; que de propos
d'amour n'ont-ils pas échangés, près de ces
ruines !... mais je m'arrête car je me souviens qu'un poète
a dit :
A toute oeuvre de foi, de génie ou d'amour,
Il faut l'ombre, il faut le mystère.
Or, le premier mars 1848, vers dix heures du soir, plusieurs ombres
gravissaient en silence un sentier tortueux qui conduisait de Linas
à la tour. La lune frappait de ses rayons argentés
ces fantômes sombres qui rendaient des reflets blancs. Ils
approchèrent de la tour et bientôt disposèrent
à terre des bêches et des pioches qu'ils portaient
sur leurs épaules et qui jetaient ces reflets dont j'ai parlé.
Que voulaient ces hommes ?...Enterrer une victime ! Enfouir leur
argent pendant ce temps de crise, pour le soustraire à la
rapacité de certains individus les épargnes de toute
une vie de labeur ?
Celui qui semblait le chef de cette petite troupe, se posant devant
les autres, prit la parole et s'écria :
- Mes amis, merci d'abord d'avoir bien voulu me suivre; vous avez
répondu à mon appel en frères qui comprennent
et veulent faire triompher les bonnes idées; vous le savez
tous la ville est située sur une hauteur, tous les puits
ont cent pieds de profondeur, c'est à dire qu'un homme fort
seul peut y puiser et que dans l'été les habitants
manquent d'eau. Donc il existe un puits sur ce plateau qui, d'après
les savants calculs que j'ai faits doit avoir environ deux cents
pieds de profondeur et cent pieds d'eau, si nous le trouvons, au
moyen de conduits souterrains nous pourrons diriger l'eau dans toute
la ville et même dans les environs.
Le lecteur a sans doute reconnu dans l'orateur André Pichot.
Après ce discours, la petite troupe se mit à l'ouvrage,
piochant, fouillant et ravageant le plateau. Quand le jour vint,
les travailleurs n'avaient rien découvert, ils se dirent
au revoir, se promettant de revenir le soir pour continuer leur
oeuvre, et ils se dispersèrent.
Grande fut la surprise des habitants, des promeneurs et des autorités
de la ville, grande surtout fut la stupéfaction du gardien
de la tour, le père Samuel invalide du premier empire, en
voyant tous à leur réveil ce tableau dévastateur.
On ne su qu'en penser, mais pour empêcher que cette scène
de désordre se renouvelât, M. le Maire ordonna qu'il
serait mis un poste dans la tour la nuit venue, les ouvriers revinrent
à leur tâche. Ce fut alors qu'ils s'aperçurent
que la tour était gardée en effet, un caporal suivi
de quatre gardes nationaux, la baïonnette croisée, arrivèrent
sur eux les sommant de se retirer.
Aussitôt, André Pichot, se redressant apostropha le
caporal, lui expliqua le but de son travail et le pria de les laisser
continuer.
On en référa à M. le Maire, celui-ci refusa
son consentement, donnant pour motif que l'on aurait du lui demander
la permission avant de commencer.
Les travailleurs, peu satisfaits de cette réponse et ne
tenant aucun compte de la défense que le maire leur faisait,
reprirent le chemin de la tour et continuèrent à piocher,
à fouiller toute la nuit. Au jour, toute la population était
montée à la tour et regardait les courageux ouvriers
en attendant l'événement.
M. le Maire ne tarda pas à se transporter sur le lieu du
délit avec les autres autorités de Montlhéry.
Sommé de nouveau de se retirer, André et ses compagnons
ne répondirent pas et continuèrent leur uvre.
La force armée intervint et les fit cesser, alors Pichot
posa sa pioche à terre, prit sa pose habituelle, et s'adressant
à la foule, il exposa encore une fois le but de ses recherches
et le bien qui en résulterait pour tout le monde de la réussite
de son projet. Les paysans en masse applaudirent Pichot, plusieurs
conseillers municipaux, trouvant qu'il y avait du bon dans cette
idée, proposèrent de la mettre aux voix; on tint conseil,
on discuta de part et d'autre, et enfin ce fut le discours d'André
qui prévalut.
Il fut donc ordonné que tous ceux qui voudraient concourir
à la découverte du puits y étaient autorisés.
Le caractère du français est avant tout enthousiaste,
il ne changera jamais; il faut qu'il bâtisse une idole quitte
à la briser le lendemain, ce qui est neuf est beau pour lui,
fut-ce même le chaos, ainsi en une heure, mille bras aidant,
le plateau fut-il remué en tous sens.
Pichot, qui avait déposé sa pioche, ne la reprit
pas, il dirigeait les travaux, parlant, gesticulant, ordonnant et
répondant aux félicitations qu'on ne manquait pas
de lui adresser, car ce jour là il était le héros
du canton. Son oncle Sainfoin vint lui serrer la main.
- Courage, lui dit-il, ce que tu as fait est d'un coeur bien épris
et d'un brave garçon.
Un seul personnage restait silencieux au milieu du bruit général
et comme attristé par la joyeuse expression que l'on pouvait
lire sur la figure triomphante de Pichot c'était Charles
Girard, que les recherches de son rival effrayaient.
Les paysans travaillèrent pendant trois jours : les riches
de l'endroit fournirent le vin aux ouvriers autant qu'il leur en
fallut.
Cependant, ils commençaient à s'impatienter de ne
rien découvrir, lorsque soudain un éboulement se fit
sur l'endroit le plus élevé de l'éminence,
et un grand trou se fit voir à environ dix pieds au-dessous
du niveau du sol.
Chapitre I Chapitre
III
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